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Le minimalisme systémique de Jean-Luc Manguin


 
164 formes linéaires contraintes de la grille 3x3", encre sur papier A3, 2016

Jean-Luc Manguin interroge les lignes, les grilles, les formes géométriques avec la volonté d’en révéler l’importance esthétique. Son approche cherche à identifier le système pertinent par une intervention minimaliste, poétique qui se livre à l’imaginaire de chacun.

Son travail préalable de calculs sur ordinateur lui permet de créer et moduler la forme au crayon graphite, au feutre à encre de Chine, ou encore à l’acrylique sur papier. Le procédé logique, arithmétique laisse émerger une présence récurrente : le carré. L’artiste l’envisage comme une figure proche, intime, ludique, porteuse d’une réflexion sur les conditions d’émergence du visible ; sur ce qui se donne à voir.
« L'ordinateur m'aide à inventorier les possibilités des systèmes qui m'intéressent, principalement basés sur la suite des nombres entiers, et sur des figures remarquables qui l'exploitent, comme le carré magique ou le carré latin. L'aléatoire ne me sert pas à créer des systèmes, mais à introduire parfois des variations, ou à tirer au sort des combinaisons parmi les trop nombreuses possibilités d'un système. »

Les combinaisons de la forme primaire convoquent l’art abstrait. Ses propositions d’agencement déterminé tendent à se faire écho et à former des ensembles. Elles sont ordonnées pour s’influencer et se répondre en agissant comme une sorte de manifeste anonyme, sans nom, sans titre.
Jean-Luc Manguin procède à la dispersion au sens où les pièces et les combinaisons semblent renouvelables indéfiniment. Cet ensemble de systèmes réunis autour de la question de l’équilibre mesure les espaces interstitiels. Il établit une hiérarchisation et invite à la reconsidération des marges et des limites, des présences et des absences.

Malgré la 2D, de l’intériorité à l’extériorité, l’effet de perspective instaure une spatialisation, une projection en relief.
L’intention de gommer toute subjectivité participe à une certaine universalité de l’œuvre. Les figures laissées à la disposition du spectateur agissent comme des modules vacants chargés par leur propre potentiel d’occupation et de déplacement. Chacun les appréhende selon sa compréhension et sa logique. Tout se passe dans cette zone accessible, de la perception intime.

Jean-Luc Manguin invoque volontiers le vocabulaire et les principes de ses maîtres : Piet Mondrian, Theo Van Doesburg, Kazimir Malevitch, Sol Lewitt, François Morellet, Max Bill, ou encore Herman de Vries. En résonance à ses référents, son travail rythme et signe sa modernité en s’emparant avec singularité des héritages du minimalisme. L’ordre, le vide et le plein silencieux… Sa personnalité plastique ouvre vers des hors-champs perceptibles et pénétrables qui questionnent à nouveau la pratique artistique.
« Le minimalisme est une des deux facettes de l'esthétique humaine, avec son opposé qui est l'exagération, l'outrance, le baroque. Suivant les époques et parfois suivant les arts, le point d'équilibre varie entre les deux. C’est pour moi une expression radicale de la simplicité, indémodable. »