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Pascal Thebault sous la trame du réel

La baie N°8 80 x 80 cm

Les œuvres de Pascal Thébault frappent par la subtilité de leur rapport à l’équilibre dont elles semblent être les trames poétiques d’un réel en perpétuel mouvement.
Sa pratique applique la méthode de l’écaillage du réel. C’est d’abord une expression libre face au paysage de la baie du Mont St Michel. La surface est ensuite scandée par une trame constituée de lignes, mesurant l’espace et apportant une « physicalité » picturale. Elle prend forme selon un système de grilles, de croisements. Cette représentation structurelle parvient à révéler une esthétique réinventée. Les intersections s'unissent et sont en soi une forme résolue de détermination, la promesse d’une continuité.
Elles recensent de curieux désordres du paysage, qui sont aussi des ordonnancements et d'infimes déplacements entre ciel et terre.
Éléments de transition, elles mettent simultanément en évidence présence et absence, créent des creux, réduisent à zéro, font place au vide et, finalement, montrent les manques en les remplissant. L’attention migre du centre vers la marge ; le cadre se fixe guidant le regard vers les points de contact entre deux limites, deux surfaces, pour les épuiser et en montrer le caractère arbitraire. Cet équilibre de forces presque métaphoriques souligne l’anecdotique qui devient signifiant. Pascal Thebault nous fait découvrir des points de vue inattendus. Il nous montre ce qui existe sans être visible et nous invite à prêter attention là où la vie peut glisser vers la rêverie.

Réalisées à l’acrylique sur bois, les toiles de cette série provoquent chez l’artiste : « des émotions particulières ; une lumière unique avec des variations continues, le flux et le reflux de la mer provoquant des évolutions de couleurs rapides, les contrastes de matières entre l’eau, la vase, le sec et le mouillé…. Les ciels tourmentés. Un univers en mouvement perpétuel où le seul élément fixe est la ligne d’horizon qui stabilise. »
Les variations proposées sont un dialogue avec la lumière. La tonalité de l’expérience lumineuse demeure une constante. Elle chérit les alliages de tonalités douces. Cette palette harmonieuse établit des indices. Il s’agit d’une révélation graduelle, proche du processus d’apparition de la couleur.

L’espace métrique illuminé est une véritable quête née de l’expérimentation de la marche de l’artiste.
« La ligne verticale symbolise l’homme debout, les pieds au sol et la tête dans les cieux, c’est l’élan spirituel (…) La ligne d’horizon stabilise, rassure le marcheur et en même temps interroge en marquant la limite entre la terre et les cieux, entre le fini et l’infini. Leur intersection forme la croix, symbole d’unité, qui concentre toutes les énergies en son centre (…) Le point vers lequel l’homme marche. »
Les paysages parcourus par le peintre font se côtoyer divers espaces et temporalités. Si le lieu reste à jamais incertain, transformé il devient l’occasion d’explorer un certain rapport au réel, filtré par de multiples couches de représentations, entre fiction et réalité.

Les chemins quadrillés de Pascal Thebault érigent de nouvelles perspectives et manifestent la volonté concrète d’une représentation abstraite. La connexion des lignes produit des micro-mondes, des terrains d’expérimentation et de projection que chacun est libre de parcourir selon le système d’orientation de son cerveau. Le réel et ses doubles sont les pièces de ce puzzle qu’il est délicieux d’assembler ou de déconstruire.