Accéder au contenu principal

Valentin Arthur Dubois, du procédé à la spontanéité




Titans, peinture en aérosol, graisse, colle et huile sur toile, 100 x 145 cm, 2018


Son travail retient d’abord le procédé. Il est entièrement dévoué aux technicités de la matière et de la couleur dont cet ancien graphiste se laisse disposer.

Il réalise au préalable des croquis pour appréhender la répartition des masses et des couleurs et laisse les lois de l’aléatoire guider sa démarche. Après une lente agonie du motif et son aboutissement à l’abstraction, l’artiste se défend désormais de n’établir aucun concept en créant des dispositifs qui acceptent l’imprévisibilité comme mode opératoire.
Hasards et errances se confrontent à la maîtrise. Cette manière de dompter la fuite et la persistance de l’inconnu n’autorise aucune forme d’exubérance.

Du libre arbitre à l’automatisme, la peinture acrylique est projetée sur des bâches en plastique enduites d’huile. Cette surface pelliculée, une fois séchée, est froissée puis déposée sur la toile afin de créer des formes aléatoires qui prolifèrent. Le collage devient infiltration laissant ces indices entretenir un lien physique, direct avec le regard tactile porté sur les propriétés matérielles et structurelles de l’œuvre. Un mélange de violence et de douceur, de brutalité et de grâce, de dissonances et d’harmonies émerge.

Le fond, ultime élément peint de la composition, cadence la palette colorée qui souligne un vert récurrent. Les effets visuels évoquent la décalcomanie où la densité des pigments et des contrastes induits par les rapprochements de couleurs, créent des profondeurs et des reliefs.
Un contour visible autour des formes sert de lisière avec le fond. L’artiste invite ainsi à la reconsidération des marges et des absences, des présences et des manques. Le dispositif, la perspective contribuent à une composition topographiée qui peut évoquer certaines cartes ou paysages vus du ciel. Pourtant les œuvres ne sont pas des territoires mais des systèmes de confrontation, de sérialité au format homothétique. 

Ce processus de création se destine à tester la faculté de perception et de compréhension du spectateur. C’est une façon de regarder la peinture par soi-même sans forcément voir ce qui est montré. Si la composition non narrative propose quelque chose, c’est au regardeur de voir ou de ne pas voir. L’artiste considère l’œuvre comme une expérience esthétique où il est nécessaire de questionner la pertinence de l'esthétique phénoménologique tout en posant ses limites interprétatives. La peinture travaille dans l’innommable, dans l’en deçà du verbal, propre à chacun. Elle inclue l'expérience contingente du spectateur, sa temporalité et le sens de l'œuvre.

Du détail à l’ensemble et vice versa, le regard suit son parcours. Dans ce va et vient, il est nécessaire de scruter, se rapprocher, se mettre à nouveau à distance pour apprécier la particularité méthodologique de création. C’est un travail qui dégage une grande force poétique en s’autorisant le plaisir et la surprise picturale.  L’expérience esthétique invite à prêter attention à ce qui existe sans être immédiatement visible.   

Valentin Arthur Dubois expose actuellement, jusqu'au 31 juillet 2018 chez  LdeO&Co, 17 rue Saint-Paul - 75004 Paris