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Lesbian kiss, 2012, huile et
acrylique fluorescent sur toile, 100 x 100 cm |
La peinture lumineuse de Steeves James Brown cultive
l’art de la double visibilité et de la surprise visuelle.
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Lesbian kiss, 2012, huile et
acrylique fluorescent sur toile, 100 x 100 cm |
Steeves James Brown mêle ce qui ne devrait pas se
rencontrer ; l’expressionnisme et l’abstrait. Les deux “tendances” se
développent selon deux voies complémentaires. L’une instantanée, saisissante se
situe au centre ; c’est une figure, généralement sensuelle, réalisée au
pinceau. Elle procure une dimension physique, immédiate. L’autre est plus
mentale, plus lente ; c’est un halo progressif exécuté au couteau qui se
déconstruit par touches successives. La figure englobée par les volutes
diffuses laisse place à ce qui l’entoure. L’artiste prend soin d’évacuer le
signe pour alimenter la dimension abstraite. Comme une fuite hors du réel,
l’image incarnée se dissout. Sa déconstruction spontanée et ses incidents sont
porteurs de sens. Dans la dernière série de l’artiste, les nuées abstraites
envahissent la totalité de la toile. Ce glissement de l’expression vers
l’abstrait est un nouveau pallier. “
Je ne suis pas encore dans l’abstrait véritable. J’ai encore des lignes, du
contenu. Un contenu retenu par ses courbes. L’abstrait est une démarche
graphique et intellectuelle, très puissante que je finirais peut-être par
atteindre.”
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The Vendée festnoz in Ibiza,
2011, huile et acrylique fluorescent sur toile, 140 x 100 cm |
Derrière l’intention abstraite, la technique n’en est
pas moins concrète, matérielle. Avec une lampe frontale dans le noir, Steeves
James Brown utilise d’abord le bleu, le rouge, le jaune… Des couleurs vives,
non réactives à la lampe noire. Puis les peintures réactives, phosphorescentes,
fluorescentes, également thermo et photo chromiques, paramagnétique ou
lithosphérique viennent s’enchevêtrer sur la toile. Certaines disparaissent,
deviennent invisibles dans l’obscurité ou à une température précise. Vivantes
et mutantes, les représentations nocturnes deviennent d’autres incarnations
diurnes. “Après mon immersion dans le noir, j’aime peindre en public pour
créer l’histoire. J’écoute les chuchotements, les bruits environnants, j’essaye
de capter l’émotion des personnes qui me regardent, l’ambiance du lieu où je
suis.” Les
couches, mémoires d’un instant, d’une étape, d’une joie se superposent, interagissent
et forgent l’histoire. Le procédé
performatif produit
un spectacle chromatique éblouissant. Une perspective secrète, la création d’un
espace nuancé intégré dans la profondeur.
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The Vendée festnoz in Ibiza,
2011, huile et acrylique fluorescent sur toile, 140 x 100 cm |
La recherche de Steeves James Brown, axée sur la
poly-visibilité, souligne la prédominance de la lumière et de sa puissance
rayonnante. La lumière avec le noir, son complice intime, révèle le sens. Elle
sépare, distingue, hiérarchise. Avec les variations de luminosité, l’artiste
détourne l’académisme pour perturber les fonctions habituelles de la peinture.
Son démarquage plastique ébranle juste ce qu’il faut, laissant surgir la
surprise picturale. La peinture caméléon de Steeves James Brown repose sur la
révélation, l’hallucination, l’illusion, et l’inattendu. C’est un aller-retour
permanent sur les effets du même qui ne sera jamais le même.