D’une vitalité toujours renouvelée, la peinture abstraite
de Gisèle Gautier-Doré est en constante évolution. Un mouvement ponctué par un
rythme chromatique qui lui appartient.
Guidée par le geste,
elle procède d’abord par le dessin puis par aplats superposés de couleurs délicates
pour aboutir à l’exaltation de couleurs plus franches.
La technique est
généralement mixte, mais son attirance pour l’aquarelle et le mélange des tonalités
à l’eau s’affirme dans son œuvre.
Son geste prolifique présente tous les symptômes de
l’exécution spontanée dictée par une force intérieure.
« Il faut méditer et à partir du sujet (réel ou
de pure invention) le transcender (…) Je suis là, devant la toile blanche et, tout à coup, le pinceau
commence son chemin. »
La surface est remplie sans saturation. De l’empâtement à une plus grande fluidité, l’artiste
donne corps à sa peinture et s'écarte
parfois de l'abstraction. Le pouvoir expressif de son geste pictural ne rompt
pas avec toute forme de transcription du réel. Il semble y
avoir presque toujours par soubassement une chose vue ou perçue. Une figure identifiable, des entrelacs
de silhouettes qui s’effacent graduellement. Quelques indices perceptibles,
parfois même quelques mots nous laissent deviner l’orientation choisie par
l’artiste. Le détail éclos et prend l’allure du hasard. Gisèle Gautier-Doré
capture des présences évanescentes. Des figures ; musiciens, brocanteurs, cultivateurs
mais aussi des éléments de natures mortes ; bouteilles, tournesols,
oranges scandent la toile. On retrouve également des paysages regroupés en
carnets de voyages ; des scènes de
mer, de France, d’Asie et d’Orient qui nous transportent vers un ailleurs et la
nostalgie d’une atmosphère.
Foire aux sorciers, technique mixte |
Si le répertoire de
sujets est hétérogène, ses toiles relèvent toutes d’une même prise de distance
avec l’ici et le maintenant. Ce regard reculé lui permet d’opérer une forme de
relativisation. Chez Paul Klee cette structure correspondait au besoin « d’extraire des moments troubles de
la perception, qui seule détermine la relativité des choses extérieures, une
idée abstraite de l’objet qui puisse s’exprimer par une représentation
globale. »
La représentation est aussi dynamisée par la couleur ; Gisèle Gautier-Doré est une coloriste affirmée.
Une
sorte d’écho s’organise où une couleur
en appelle une autre puis le lâcher-prise laisse évoluer les tons dans de
subtils dégradés. Les couches se disposent une à une sous un jeu de variations
qui relève d’une technique sans failles. Une véritable succession ininterrompue
de surprises, de fragments, de superpositions, de distances et de
confrontations. Ses travaux montrent les étapes d’une recherche, d’une creusée
sensible.
La peinture de Gisèle
Gautier-Doré nous guide dans son abstraction polymorphe vers une multitude
d’apparences qui enrichie notre vision du monde et de nous-mêmes.