Christine-Marie
Nobre créée une esthétique où l’ombre et la lumière sont les arbitres de formes
surprenantes.
Formée au Beaux-Arts de Versailles,
Christine-Marie Nobre est une artiste pluridisciplinaire passionnée de lumière.
Ce qui l’anime c’est le plaisir de l’expérimentation, la création de
phénomènes, de petits miracles. Pour les
obtenir, elle construit ses « boîtes de lumières » dans lesquelles
elle place miroirs, peintures et éclairages. Elle les anime ensuite par la
photographie ou la vidéo, un œil supplémentaire qui lui permet de capter par des
petites fenêtres les phénomènes lumineux.
Dotée d’une maîtrise technique singulière, elle
jongle avec le détournement et l’inattendu pour mettre en scène la présence
d’une réalité, par essence indéterminée.
Traversées d’ondes lumineuses et colorées, ses œuvres
retranscrivent les expériences de la diffraction de la lumière. La lumière apparaît artificielle, tel un ciel intérieur, celui
d’une lanterne magique.
L’artiste invente une esthétique numérique de
l’art cinétique qui procure cet aspect d’œuvre changeante et mouvante. La mise au point et l’analyse de la luminosité
ont le pouvoir de suggérer plus que de montrer. De la lumière au clair-obscur,
des effets de profondeur se dessinent.
Les couleurs sont parfois transparentes, ou donnent l’impression de
faire écran.
Les degrés de clartés et d’obscurité sont
en suspension pure, comme en lévitation dans l’espace. Un lieu
imaginaire, idéal, une vue de l’esprit se fabrique. Le spectateur franchit avec
elle le seuil de l'inconnu ; une propriété étrange qui s'agrandit et se
rétrécit sous ses yeux.
Christine-Marie Nobre créée un climax où le
point culminant active l’opposition entre le jour et la nuit, entre le
scientifique et le poétique. Elle reconstruit un
point de vue fragmenté où l’onirisme contamine les formes abstraites et
répétitives. Cette hallucination trompe
les sens et ouvre l’imaginaire. Elle révèle même une puissante aspiration vers les abîmes,
constituant un espace catalyseur de
nos croyances qui produit des images au sens où Platon pouvait l’entendre.
"J'appelle image d'abord les ombres, ensuite les reflets qu'on voit
dans les eaux, ou à la surface des corps opaques, polis et brillants, et toutes
les représentations de ce genre".
Suis moi, photographie, 30 x 40 x cm |
La représentation illusionniste efface la distinction entre
le fond et la forme. La démultiplication des surfaces de projection est physique
et mentale. L’effet n’est pas sans conséquences méditatives. On peut
effectivement accorder aux travaux de Marie-Christrine Nobre une vision
surnaturelle, spirituelle, voire spectrale, de l’ordre de l’illumination. Mais elle
l’appréhende par des formes multiples qui préservent leur caractère universel,
sans interprétation ou représentation divine. Un certain rythme de l’élévation sous un axe paradigmatique
ponctue sa démarche. Cette verticalité se remarque particulièrement sur les
photos et les vidéos, le cercle dominant davantage ses peintures. L’art est avec elle une aventure protéiforme
où l’apparition, le surgissement, la dissolution sont au cœur de
l’interprétation.