Soledad Penalta travaille l’acier inoxydable et l’acier Corten,
un métal auto-patiné à corrosion superficielle forcée, réputé pour son aspect
et sa résistance aux conditions atmosphériques.
Elle plie, coupe, martèle, soude, peint et patine la matière
en plaques, lamelles souples et arceaux puis insère des personnages en
mouvements et des écritures. Ces mots et ces anonymes dessinés à même l’acier attisent
le feu et la curiosité. Le trait est finement intégré sans dessin préalable et sans
repentir visible.
“ C’est la trace d’une méditation, d’un accord
musical, d’un poème… Un artiste est toujours à la frontière de tous les
risques. Aujourd’hui la réalité quotidienne laisse peut de place à
l'imagination, il faut continuellement l’agrandir avec de nouvelles images.
”
Entre
figuration et abstraction, ses pièces uniques sont des créations parfaitement
identifiables qui n’empruntent aucun autre terrain esthétique. Elles incarnent les traces de l’appropriation de la
matière par l’artiste.
“Ces aciers ont
la caractéristique de permettre une coupe unique, définitive, irréparable,
irremplaçable. Je ne reviens jamais sur mes coupes. Mes œuvres sont le témoin
d’une création spontanée qui cherche à bousculer un certain classicisme en
sculpture.”
Mobiles, souples et
polymorphes, les sculptures de Soledad Penalta sont des ovnis, des
phénomènes renversants, des objets totémiques, en quête d’une nouvelle terre,
qui taisent leur origine exacte. Ils s’installent au sol comme au mur, laissant
apparaître les plans supérieurs et inférieurs sous une multiplicité d’angles.
Des formes concrètes, des ombres portées se dessinent et se projettent sur les
plans verticaux et horizontaux, entrainant également des bruits et mouvements
distinctifs. La matière et le mouvement instables
sont comme issus du souffle cosmique. L’œuvre de Soledad Penalta est
mouvante et vivante, aérienne et aquatique à la fois. Ses sculptures
jaillissent tels des ruisseaux d’acier figé. Leurs reflets changeants se
dessinent sous une transparence insoupçonnée. L’équilibre s’installe entre les pleins et les vides jusqu’à
l’obtention d’un état de grâce situé juste entre force et fragilité. Ses œuvres participent à un dialogue subtil avec l’environnement
et le spectateur qui peut circuler entre les lignes courbes, élancées et pures
des éléments en équilibre.
La robustesse et le
tranchant de la matière peuvent créer un sentiment d'insécurité, nuancé par la
beauté de l’acier et de ses perspectives offertes. Le spectateur
contemple le duel entre le geste brûlant, expressionniste de l’artiste et les
lignes froides de la matière.
C’est dans cette oscillation permanente de la contemplation matérielle
et de l’identification du geste et des formes que réside ce trouble délicat.
Une étrangeté radicale de volumes à la fois concentrés et en expansion. Le
point de fuite des corps et des écritures laisse présager un espace du possible
opposé à la rigueur géométrique des plaques. C’est là, toute la poésie de l’espace de liberté
de Soledad Penalta.