Sur toile de lin brut, Isabelle Geli peint à l’huile et à
l’acrylique au couteau.
« Le couteau
m'apporte la spontanéité dans le geste, c'est du mouvement, du gestuel, je
laisse parler ainsi mon ressenti. Sous le couteau les couleurs se mélangent en
caressant la toile avec douceur ; je ne brise pas les pigments et les tons sont
plus vifs et plus lumineux. »
L’artiste peint la nature, la ville, la mer, les ports, les
fleurs, les portraits… Tout ce qui croise son chemin. Elle expérimente le
paysage et sa perception pour faire osciller la représentation entre étrangeté
et familiarité.
« Les
constructions des building, des bâtiments, me font travailler la perspective et
donnent de la profondeur, ils sont souvent au bord de l'eau pour un travail de
transparence. »
Ce contraste entre la nature et l'urbanisation est envisagé
sous une inflexion surréaliste. Certains éléments sont en inadéquation avec ce
qui les entoure. Les formes disparates, familières se rassemblent sous une certaine
tension ; le cercle, la fleur jaillissent ici et là, confrontant tour à
tour le spectateur à des situations
improbables.
Sous cet empilement chaotique mais organisé, Isabelle Geli
créée le surgissement simultané et décentre la question de la pure représentation.
Le signe est vidé de son sens initial, où seul resterait le souvenir d’une
présence, d’une expérience, d’un vécu. C’est un hommage abstrait au réel, un
glissement du monde réel vers le monde fictionnel.
Des pétales de roses,
2014, acrylique sur toile de lin brut, 80 x 80 cm
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Des tours géométriques s'élèvent sous une auréole. Les
événements du 11 septembre ne sont pas loin. Le végétal et les vagues de
lumière englobent avec une certaine spiritualité le symbole. Isabelle Geli
cumule les références et multiplie les entrechocs.
C’est l’image frissonnante d’un monde qui part à la dérive,
flottant sur une eau trouble. Son travail onirique à l’allure apocalyptique se
bâtit sur les angoisses et les rêves. D’autres images échappent au contrôle
conscient et accède à l’innocence de la forme inconsciente. La narration s’adresse
aux projections mentales des spectateurs. Les toiles d’Isabelle Geli peuvent
être regardées et appropriées par tous. Les lignes s’entremêlent et dessinent
des terrains de vie, remplis de vague à l’âme que chacun pourra interpréter.
Sa libre méthode et son expansion de la forme lui confèrent
une poésie picturale propre. Isabelle Geli refuse la frontalité et la froideur,
elle préfère l’émotion. Ses compositions savamment colorées de couleurs chaudes
et plus glacées s’unissent pour procurer une apparence sereine.
Lentement et sans heurts, elle nous transporte dans son
monde intérieur, un ailleurs où l’unité
de style est parfaitement identifiable. Elle
nous fraye un chemin pour retrouver l’entrée d’un paradis perdu. Au gré de ses
aventures personnelles, de ses errances et de ses pulsions contrôlées,
l’artiste explore les contre-allées, à la lisière de l’explicite, entre
apparitions et disparitions. Elle rend visible la partie émergée de l’iceberg pour
mêler subtilement l’intime au public.