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Denise Jensen, cheminement vers l’abstrait


Regard de femme, huile sur toile, 100 x 50 cm
La mode, la peinture aux touches figuratives est un point de départ que l’artiste choisit d’étirer jusqu’au degré subtil d’une abstraction aux nouveaux confins.

Il y a au préalable l’attrait du tissu puis celui du papier, du dessin, et de la peinture. Sous le geste maîtrisé de l’artiste, des silhouettes naissent sur la toile. Elles sont les matrices affinées d’un processus progressif de déconstruction, de fragmentation de la forme et de la couleur.
 « Après avoir utilisé comme support le tissu, essentiellement la soie,  j’ai laissé glisser mon pinceau dans la fluidité pour en faire par la suite des vêtements uniques aux couleurs très fortes. Le passage sur papier s'est ensuite imposé comme une évidence. Les silhouettes sont nées d’un élan figuratif pour retrouver le dessin de mode tout en laissant l'imagination vagabonde autour de leur présence. Les dessins de Kiraz pour représenter la femme sont pour moi une inspiration du monde de la mode. La femme moderne dans sa vitalité représente toute l'énergie qu'elle dégage, d'où la couleur rouge pour la représenter. »
L'artiste a déjà cette tendance à dissoudre la figure dans la peinture. Puis les silhouettes se transforment au fur et à mesure dans le temps. Elles se nouent et se dénouent dans un jeu de scènes de ce qui pourrait être le début d’une narration abstraite. L’entrelacement des lignes, les fragments de formes, les courbes identifiables s’effacent. Elles deviennent insaisissables, lointaines, étrangères.
La peinture de Denise Jensen se modifie, avance doucement. Il s’agit de redonner à voir, dans un autre espace, un autre temps.
Une sensation de suspension, d’apesanteur s’empare du regardeur. L’artiste ne se confine désormais plus dans la représentation figurative.  Les motifs sont tronqués. Sa peinture s’ouvre, déborde du cadre, devient vertigineuse. Elle laisse désormais irradier son aura, immatérielle, à l’huile parfois à l’acrylique. Un champ magnétique coloré s’affine avec un rouge toujours en touche mais qui s’efface crescendo.

Turbulence, huile sur toile, 92 x 73 cmAjouter une légende
« Le rouge reste présent dans  mes toiles abstraites mais je me dirige beaucoup plus vers des couleurs douces, et de plus en plus monochromes. La difficulté est de créer un dynamisme dans une ambiance calme, toute ma recherche tourne autour de ce thème.»
Les nuances de tons viennent introduire une étrangeté dans l’ordinaire, elles rendent énigmatique l’évidence. Ce n’est pas un hasard si l’artiste affectionne les maîtres de la couleur, de lumière et du geste.
«  J’apprécie particulièrement Kandinsky pour le mélange des couleurs, Nicolas de Staël pour la construction, Hans Hartung pour la puissance du geste, Turner pour la lumière ou encore Zao Wou Ki parce qu’il nous transporte dans un rêve... »
Denise Jensen interroge les limbes de son réel. Elle peint désormais en questionnant le fictif et son imaginaire. Elle laisse en suspend mais les interrogations sont pénétrables pour le regardeur et d’une grande force poétique.
Du figuratif à l’abstrait, des tonalités fortes aux plus nuancées,  son art s’inscrit dans une inscription aussi définitive que transitoire. Le déplacement et la transposition de la forme et de la couleur ancrent ses travaux dans une instantanéité. Ils portent la tension de l’instant. C’est une traversée de la mutation. Un point de départ vers de nouveaux possibles.