Abstraction Gestuelle n°13, 100 cm X 100 cm, huile sur toile au couteau |
Patrice Claude
se plaît à jouer des contrastes, de la couleur et du
trait. C’est le primat de l’expérience sur l’œuvre, entre l’intention et
l’accident. Sa création oscillante souligne l’importance de l’adversité mise à
l’épreuve. Un véritable rapport de force se transmet au spectateur sous forme
d’abstraction gestuelle.
Pour un contact plus direct et plus manuel avec la peinture, l’artiste
fabrique sa peinture avec des pigments en poudre. Il peint exclusivement au
couteau ancré ou lisse.
“L’inspiration de départ vient d’une couleur ou d’une forme, c’est la
matière picturale qui me guide ensuite, par contraste, antagonisme,
polychromie.
Je n’utilise pas beaucoup la ligne droite. Ma toile
est un canevas tissé dont les motifs sortis de mes couteaux bifurquent
allègrement, comme des racines d’arbres…”
Dans les profondeurs de
son inconscient, les embranchements dessinent son tempérament pictural.
La contamination et la saturation des lignes
s’enracinent comme la prédominance de la couleur vive. Ce procédé renvoie à la
part infantile. Son travail dévoile un foisonnement sans hiérarchie, une part
naïve et assumée à la force libératrice. Entre exutoire et fascination, ses
toiles soulignent l’aspect régressif, inévitablement vital et jouissif.
Son audace s’affirme par des entrelacs, des déchirures, des griffures entremêlées
comme une punition ou un châtiment qui tiendrait du brisé, du secret… Jusqu’à
la constitution d’un Tout homogène qui entraîne le spectateur dans un
tourbillon d’émiettements.
De l’abstrait à l’informel, ses toiles semblent être passées au mixeur
de cuisine de la petite enfance.
Cette forme d’automatisme permet d’autres connexions entre la main et l’esprit.
Elle ordonne le chaos des rebuts qu’elle récupère, des souvenirs d’hier. Un jaillissement
du passé, vivant, mouvementé, haut en couleur. Patrice Claude renoue le passé au présent avec ses propres fils.
C’est le geste qui prime, quitte à être d’une simplicité affirmée.
Tout est visible ; l’évidence comme le repentir. L’artiste répète
son geste sous une scansion rythmique de sa main pour constituer une addition
de fractions réduites à leur plus simple expression. De cette intention
minimale émerge un enchantement.
Sa peinture s’ouvre, déborde, joue sur les bords, sur le hors-champ et
la coupure. Son élan
envahit tout l’espace et semble vouloir le faire craquer en un mouvement
incontrôlable sous une pulsion de vie.
Son aura, son champ magnétique coloré se laisse irradier. La virulence de ses tonalités se dilue aux confins
de la toile. Il s’agit de franchir la norme, transgresser et
doser ce subtil mélange de brutalité et de fragilité.
Patrice Claude est un puissant révélateur de la trace et de la couleur. Il
élabore une peinture qui combine à sa manière déconstruction et résurgence.