Patrick Telot
travaille à l’aventure mais l’aléatoire et la surprise picturale sont conduits par
une ligne directrice.
Une ligne d’horizon
scande la toile et fabrique une structure sol-ciel, une mince frontière qui révèle l’existence de réalités
invisibles et inconnues.
Sa
peinture aboutit de manière épurée à une abstraction radicale et élégante.
La ligne accentue l’effet de miroir, l’impression de rapprochement. Il n’est pas question de rupture mais de mis
en lien. C’est une « reliance », un axe de toute construction, du
ciel vers la terre.
« Je travaille par lignes de force. La ligne est
une base visuelle contemplative qui permet l’immersion dans un paysage vers des
plans de fuite. »
L’artiste place son fond
à l’acrylique puis peint ses effets de textures, d’empâtements et de modulations
à l’huile par ajout et retrait. Le badigeon épais, son outil de prédilection,
se soustrait au pinceau, au couteau, au chiffon, au racloir ou même à ses
doigts pour affiner la touche. Son geste se laisse absorber par son imagination
pour découper l’espace.
La tension
horizontale étire le monde et oriente vers un équilibre dynamique, une
impression de continuité, un élan rythmique. Elle délimite, dans un système de contrepoids, un contour, celui des plans colorés.
Les échelles de gris, de
bleu, de vert enrobent une touche plus vive rouge, orangée, parfois jaune.
La planéité de la
toile s’affirme sous une impression de stabilité. Mais la variation des tons oscille et creuse
l’espace, animant la toile d’une illusion de relief. L’artiste est très admiratif de la profondeur. Il
puise in situ dans les carrières de son inconscient. Son procédé
attire minutieusement l’œil vers une perception cérébrale des abîmes de la
couleur et de la lumière. C’est là toute sa coexistence harmonieuse, source de
sa créativité.
fouillis de lumiere. Huile sur toile. 50 x 80 cm |
« Je m’autocensure vers les choses trop
expressionnistes, noires, violentes. La lumière doit toujours être présente. »
Patrick Telot est à la recherche d’une sensibilité picturale
pure, les traits et la couleur ne sont travaillés que pour faire réagir à
l’absence du réel. Ses lignes ne donnent pas l’impression d’une mécanique sans
affect. Elles imposent une émotion du regard et dessinent une limite à
franchir. Cette tentation transgressive ouvre tous les champs imaginaires mais
aussi le risque de perdre la notion de l’espace. Là même où la terre
deviendrait firmament et vice et versa.
L’artiste n’est pas
maintenu derrière cette linéarité qui le briderait pour montrer uniquement le dessous
et le dessus. Il utilise son axe de prédilection pour construire la naissance
d’un nouveau monde.
« Si la ligne m’enchaîne et me contraint, elle ne
m’empêche pas d’occuper le terrain et de travailler d’avantage le surgissement.
Elle sera certainement toujours présente dans mes travaux même si mes prochaines toiles feront
d’avantage écho à l’humain. »