Kathy Le Vavasseur montre et transforme la matière comme ressentiment de son vécu. Elle se l’approprie pour mieux la détourner et la fusionner avec une autre. L’encre, la peinture, la résine, le textile, le verre, la terre… Son terrain d’expression plurielle s’exprime sans frontières.
La terre qu’elle modèle de façon
novatrice et expérimentale pose la question essentielle d'un nouvel
ancrage du matériau ancestral. Un désir organique à la recherche de la source
et de l’identité. Bercée et chahutée dans son enfance par les eaux du Mékong, Kathy Le Vavasseur a gardé en
mémoire la magie de la
lumière, les effets du vent, les
ondes et les remous tumultueux du fleuve et de son pays - le Vietnam- qu’elle a
été contrainte de quitter.
«Je m’inspire des éléments naturels et en particulier
de l’eau qui évoque toute mon enfance passée sur les bords du Mékong. Là-bas, où
l’on s’émerveille qu’à la surface de cette eau limoneuse et opaque, émerge une
végétation magnifique : le lotus, symbole de pureté ; de la boue naît
la beauté.»
L’artiste tient pour bagage à la fois la
poésie calme et turbulente des vagues.
La sensualité naît de cette « physicalité »
avec la matière comme une empreinte constitutive de son histoire, un rapport
intuitif, immédiat avec son intimité. Au cœur de la substance, elle revivifie
son parcours, questionne sa construction, créée en volume son ressenti et recherche
un équilibre des formes dans les traces et les empreintes qu’elle porte.
Fragile comme la matière, elle fait référence à l’expression d’une existence
mélancolique, libre, insolite, issue
d'une triple culture vietnamienne et italo-française. Son vocabulaire abstrait et
signifiant interroge les moments intangibles d’une histoire enfuie.
Nước xoáy |
Un
tendre spleen émane de ces totems d’une enfance perdue. Son élaboration lente
et progressive est un retour, une écoute émue de son passé, une mémoire vive, un
formidable
paradoxe
dans notre époque de vitesse et de superficialité.
La montée
manuelle de la forme absorbe le réel. Epurée, sans rigidité, elle s’étire,
s’assouplit. Sous ses doigts, elle
laisse glisser,
couler. Puis elle ajoute, gratte, coupe, souligne. Au fil du temps les volumes
évoluent, se répondent et nous entraînent dans un infini mouvement.
Ses objets sculpturaux minimalistes se
composent tels les pièces d’un puzzle. Ils s’associent, se dissocient,
s’assemblent, se déclinent, en séries. Autonomes, ils
font écho entre eux et avec l’espace. C’est un chemin, une sensation à la fois
visuelle et tactile.
L’artiste
élabore des terres de contrastes discrets, entre le lisse et l’aspérité, le
doux et le pointu, le soyeux et le rugueux, le plat et le relief qu'il faut
caresser pour s’approprier. Les œuvres de Kathy Le Vavasseur sont remarquables
pour ce qu’elles rappellent de la fragilité de vie.