109 Boulevard Haussmann, une devanture du 19ème siècle. Huile sur toile, 100 x 100 cm |
La présence du corps a toujours été centrale dans sa pratique. Sa série « Femmes dans la ville » opte pour une physicalité plus frontale où le réalisme de la nudité se dispute à l’étrange.
Habituellement
restreint à l’intime et proscrit du territoire extérieur, le nu apparaît ici
sous un usage public, inséré dans l’espace urbain, une rue, un passage, une
place… Le surgissement inattendu de la femme dévêtue, n’attire pour autant pas
le regard du passant dans la scène.
“Un corps qui
ne cache rien montre à l’évidence qu’il n’a rien à cacher. Il est sans mystère,
pur, confronté aux personnages du quotidien, à leur complexité, aux
interrogations de leurs existences et à l’espace urbain malheureusement
quelquefois déshumanisé.”
En imbriquant l’intime et le questionnement social, l’artiste interroge
la liberté du corps, sa captation du sensible par un pur moment de relation au
monde.
Au-delà
des apparences, dans des espaces de questionnements subtils, Il fabrique un art de voir. Cette
situation charnelle et atypique, déploie notre regard en l’érotisant. Des yeux
du modèle à celui du spectateur, du regardant au regardé, la ligne se trace
dans ce face à face où les regards se croisent et s’échangent.
“Ici la nudité n’a rien à voir avec
l’exhibitionnisme puisque les modèles vivent dans un monde différent de celui d’une
vie qui ne les voit pas.”
Alain Malo peint en jouant
avec le réel et son imaginaire. Sa peinture figurative est un témoignage
vraisemblable qui prend vie dans un monde parallèle. Cet univers fantasmé et
ses habitantes d’un autre monde “font
apparaître la féminité à l’état pur, naturel.”
Il est intéressant de
s’attarder sur l’origine, la provenance des corps présents dans ses œuvres. Il
s’agit de redonner à voir, dans un autre espace, un autre temps ; une ère surréaliste, décalée, qui rejoue différemment le réel.
Un monde clos où le temps semble suspendu, comme enfermé. L’ancrage est pourtant terrestre, les scènes sont inspirées des villes
de Paris ou de La Rochelle. L’artiste se prête effectivement au jeu de la référence sans s’en cacher.
L’écart se creuse entre le premier
plan ; celui du modèle et le second ; celui du paysage. Cette mise à
distance, de l’injection sociale du corps nu dans la ville, souligne
l’étrangeté de la scène. Son irruption dans l’espace public, sa
stature érotique semble chercher à s’accaparer les lieux. Les belles envahisseuses immobiles
prennent paisiblement la pose. Une série d’expressions
s’animent sur leurs faciès et tranchent
sur l’immobilité de leurs corps.
Toutes, dans leur situation, ont en commun une situation de
fragilité. Cette intention esthétique souligne leurs présences singulières.
Attirantes, troublantes, suspectes, les
femmes sculpturales d’Alain Malo ponctuent un espace revisité et nourrissent
cette inquiétante puissance qui réside dans cette
curieuse proximité entre l’organique et l’urbain.