Territoires pélagiques est une série d’œuvres construite à partir de séjours ; de périodes et de territoires qui questionnent la notion du paysage et son impact sur le processus de création.
Né dans le paysage montagneux des Pyrénées Ariégeoises, le
projet de Patricia Proust-labeyrie « nécessite une attitude d’auto-observation,
de perception et de réception maximale entraînant plusieurs contraintes : la
solitude, un lieu, une durée minimum d’un mois (…) sans intention précise, sans
motivation de rendu d’un quelconque travail, avec une mise en totale
disponibilité et porosité. »
Cinq territoires (Ciel, Paysage, Abri, Silence, Météores)
se sont progressivement élaborés
avec leurs propres procédés techniques. Une créativité sous toutes ses formes
pour matérialiser le lieu vécu.
Peinture à l’acrylique, à l’huile, enduit mat et
granuleux, végétaux et minéraux prélevés sur les lieux, cire de bougie, fixé sous verre à l’acrylique ou photos tirées
sur plexiglas, écrits apposés… La technique mixte et contrastée de l’artiste
témoigne d’une expérimentation esthétique
ouverte, sans frontières.
« Les éléments géographiques et météorologiques ainsi que
tout autre élément de quelque nature qu’il soit, nourrit, fertilise, façonne et
argumente ma compréhension du fonctionnement de toutes choses. »
Chaque sédiment pictural est envisagé comme une donnée plastique et agissante sur la
personnalité mouvante, qui évolue en
fonction de l’environnement.
Ciel |
Cet archivage de données capturées sur le lieu, participe de l’impact du paysage sur
la perception et l’imaginaire. L’impact de l’espace extérieur sur l’intérieur,
de la surface sur le fond et
inversement ; fait surgir
un vaste monde parallèle, mystérieux, insaisissable mais réel. Là même où le potentiel
d’énergie s’exploite comme véritable refuge de création.
Patricia Proust-labeyrie joue de la plasticité pour dire
ce qu’elle voit et ce qu’elle pressent.
Elle défend la forme tout en pratiquant le flou, superpose des images et les relie par des lignes pour mieux
en souligner les correspondances invisibles, à l’intersection desquelles
campent des structures plus ou
moins identifiables. Le récit est interrompu par greffes d’éléments choisis.
« Il s’agit d’élucider ce qui se trame au quotidien, à
notre insu, ce qui stimule nos perceptions cognitives à partir de la complexité
du réel. »
La réalité est multiple. Ses travaux élargissent
l’émerveillement du monde en l’abordant
par le champ de l’expérience
phénoménologique. Ils franchissent les barrières sous la dimension de la
conscience, vers la liberté de l’intuition, entre l’intelligible et l’indiscernable. L’exploration laisse
délicieusement apparaître des visions immédiatement remises en cause. Le
trouble est à son paroxysme. Il ne s’agit pas de chercher incessamment la
cohérence. Le lieu et le moment se dévoilent subrepticement pour disparaître.
Au-delà des vérités scientifiques, l’espace et le temps «
ces dimensions intérieures de la matière » (comme définies par Einstein)
sont en constante transformation. La matière grise du regardeur figera et
traduira selon le fruit de sa pensée. C’est un voyage vers la subjectivité. Une
exploration à la fois intimiste et lointaine qui s’inscrit dans la démarche du
groupe Plasticité- Science- Art, réflexion épistémologique sur l’observation de
la plastique du vivant.