Don't do it, it's a trap,
40 cm x 80
cm,
acrylic on canvas, 2016
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Ronnie Jiang aime créer des situations impossibles et irrationnelles. Aux confins d’un certain surréalisme, l’artiste propose une série autour du ballet où elle met en scène des étoiles déchaussées, décoiffées ou encore transformées en marionnettes.
Ronnie Jiang fait de chacune de ses toiles une chorégraphie picturale.
La performance se tient au pinceau à l’acrylique. Parmi le flux des images
circulant sur Internet, l’artiste pioche avec délectation dans le corpus de la
danse classique.
La scène est ensuite détournée selon ses besoins. Le décor peut
être modifié, comme la structure d’un visage, d’une coiffure ou la couleur de peau.
L’artiste invente une histoire en
transcrivant sa perception en état de rêve.
« Je ne suis pas danseuse mais l'univers du ballet
m'a toujours beaucoup attiré depuis mon enfance. J'aime regarder les expressions
et les mouvements. »
Cette captation
admirative se traduit par une volonté d’enregistrer des gestes maîtrisés. Pour
ce faire, un cadrage serré sur des battements de pieds déchaussés de leurs ballerines
s’envolent vers des cieux nuageux en haute voltige. Ces pieds précieux,
fragiles se libèrent de leurs pointes avec une certaine cocasserie.
Une danseuse
guidée par les fils d’un marionnettiste semble ne pas maîtriser seule son arabesque.
Une inquiétante étrangeté sépare l’animé et l’inanimé, renforcée par une paire
de ciseaux prête à couper la tension du fil.
Une autre étoile
ornée d’une coiffe de chat se fait ajuster son nœud de cheveux par des mains
providentielles et énigmatiques. Si les gestes sont reproduits fidèlement et
les danseuses saisies dans leur essence, elles ne sont pas situées dans un
contexte précis. L’artiste se concentre sur la figure sans se soucier de
l’insérer dans un espace reconnaissable.
Mon Humaine et Moi, 73 cm x 54 cm,
acrylic on Canvas 2016
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Avec la
pratique des gros plans, des oppositions heurtées, Ronnie Jiang créée un rôle
dans la suggestion de l’espace exploité par le fond qu’elle construit au
couteau, au rouleau, à l’éponge ou à l’aide d’un pochoir. Celui-ci peut se voir
ponctuer d’aplats géométriques voir de bulles de dialogues.
Toutes ces
situations surréalistes déconstruisent l’espace d’une scène. La surprise et la
juxtaposition inattendue participent à l’univers poétique emprunt d’une
atmosphère mystérieuse.
Les corps sont suffisamment
rendus réalistes pour que naissent à travers le motif, gracieusement répété,
des courbes fluides qui s’agitent sous une pulsation ininterrompue. Les
mouvements élancés tendent les corps dans un subtil élan vertical, aérien.
Ronnie Jiang ne
pratique pas le grand écart, ses légères variations emportent ses danseuses
dans une autre dimension parfaitement identifiable, du monde du spectacle à
l’intime.
Les points de
vue insolites, les instants cachés qui précèdent ou qui suivent le spectacle sont
privilégiés.
Par son geste
créatif, l’artiste impose sa touche d’une surprenante valeur expressive et exalte
l’esprit du monde du ballet.