Cages pour oiseaux libres de la Grée des Landes, La Gacilly, France, 2011, 9 éléments, bois de noisetier, résine et pigment, 50 x 50 x 350 cm environ pour chaque élément. |
En quête de points de vue, Jean-Jacques Pigeon combine
savamment le goût de l’expérimentation avec son matériau de prédilection :
la branche de bois, et ses idées de mise en espace.
Pour sa série in-situ, il
travaille à chaque fois différemment avec l’environnement dans lequel il
s’inscrit. Sculptures, mobiles, cages pour oiseaux, tapis muraux, cadres… Comme
le temps, ses supports s’étirent et se multiplient vers de nouveaux possibles, avec
toujours cette esthétique parfaitement identifiable. Une dimension constructive
où chaque branche conserve une relative autonomie, tout en étant prise dans un
faisceau de relations communicantes aux linéaments distincts.
Jean-Jacques Pigeon n’imite
pas les formes de la nature, il les prélèvent. Il cueille des essences de bois diverses
et ordinaires ; Acacia, noisetier, chêne rouge, frêne, clématite sauvage, lierre.
Les branches sont collectées pour la plupart en bord de Loire ou
bien dans l’environnement immédiat de l’atelier de l’artiste. Une fois coupées,
elles sont écorcées, séchées, poncées et recouvertes de bandes plâtrées
trempées dans un mélange coloré. Ensuite vient l’assemblage et le masquage des
points de jonction. Un savant procédé où la technicité s’efface dans une
remarquable transparence, là-même où les interstices et les intervalles sont
exploités en permanence au profit de la linéarité. « J’aime rendre visibles et sensibles les traits, les lignes, en
leur donnant du relief. »
Jean-Jacques Pigeon n’a pas
oublié son enfance, ses cabanes de toutes sortes, construites pour les mouches comme pour les êtres
humains, ses ballades dans le Marais poitevin, en toute saison, où les
entrelacs de canaux se mêlent aux entrelacs végétaux.
Dans chacune de
ses œuvres, les lignes agitées se tordent dans tous les sens. Elles
s’affrontent, se superposent, se confrontent. Dans cette perpétuelle rivalité
entre la ligne et la surface, entre l’équilibre et le déséquilibre, l’artiste
trace la direction de l’œuvre. Parfois de simples brindilles peintes souvent en
noir, permettent de reproduire un motif sur le mur ; des dessins
primitifs, baroques ou plus abstraits. D’autres en relief, et en couleur,
s’installent dans l’espace, suspendues ou au sol.
Il noue volontairement les ressorts
fantaisistes de l’inerte. Une étrange sensation de mort et de vie est ainsi mise
en évidence. Une expression de régénération du naturel. Les branches mortes, transformées
dans leur essence, prennent une nouvelle vie, un nouvel ancrage dans le lieu d’exposition.
Il met en jeu
certains codes de l’art contextuel. Une « esthétique relationnelle »
où chaque proposition est une réponse à l’espace.
« Impossible pour moi de faire
abstraction du contexte de présentation d’une œuvre (...)Toute réalisation in-situ
se fait en fonction du lieu, de son histoire, de la symbolique associée, de ses
dimensions, de sa lumière… Il s’agit de travailler en adéquation ou en
opposition avec le lieu. »
Jean-Jacques Pigeon cherche
constamment la réactivité et l’illusion d’optique. Les lignes de forces de Daniel Buren, Georges
Rousse, Felice Varini sont ses références.
Les
perturbations de l’œil, les mises en relief et les écrasements de plans, les
inversions d’espace où ce qui est devant passe derrière et vice et versa, sont une
complexité rythmique propre à l’artiste.
Jean-Jacques Pigeon est un scénographe de génie, si proche des architectures
imaginaires.