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Michel Marant, nature « demie-abstraite »

Plans d'eau, technique mixte sur toile, 38 x 46cm, 2016

Sa méthode de captation de la nature provoque des rencontres indiciaires qui font sens entre le figuratif et l’abstrait. 

« J'ai voulu consacrer une série de peintures mettant en valeur les richesses du Limousin ; la porcelaine comme l’élevage. J'ai incorporé à mes toiles des assiettes en porcelaine sur lesquelles j'ai peint des bovins ou des fleurs représentant la nature, et des blocs symbolisant la culture. »
Dans une oscillation entre prélèvement, mise en scène, représentation et altération de la perception, sa peinture se prête au jeu des références et des codes. Les thèmes, les techniques, les associations visuelles, les cadrages, les couleurs utilisées… Tout sort de l’ordinaire et tout est à regarder.

Ses toiles se construisent à l'acrylique par aplats et fragments reconstitués. Pour fabriquer ses espaces, il puise son inspiration d’une expérience personnelle. Ces instants vécus ravivent des souvenirs marquants et participent à l’originalité de son vocabulaire plastique.
« Touché par un séisme en Italie, je n'ai vu que des blocs de pierres s'entasser les uns sur les autres, ce qui m'a incité à peindre des carrés et des rectangles, d'où émerge, malgré ce sinistre, une nouvelle vie. C'est la raison pour laquelle j'ai intitulé ces peintures "demi-abstrait" car au-delà de ces bouleversements de la nature il y a toujours une renaissance. »
Ses travaux jouent sur l’apparition de l’image. L’idée de la résurgence et de la permanence est entretenue par la forme répétée des fleurs et des champs ; une vue aérienne des cultures et des pâturages dans lesquels les bovins vivent en toute liberté.
Les aplats bleus de cobalt et bleus clairs évoquent les plans d'eau nombreux en Limousin, les aplats verts, les pâturages, les aplats jaunes, rouges orangés illustrent les céréales.

Les quatre saisons, acrylique sur toile, 102 x 124 cm, 2017
Ce lot d’images mentales participe à un climat de réminiscence et fait référence à l’Art Nouveau. Les compositions s’apparentent à des natures mortes revisitées, bousculées. C’est un extrait de nature reconstituée, calme et harmonieuse où les formes ondoyantes et rectangulaires s’enchevêtrent. Leurs volutes privilégient l’esthétique des courbes, des lignes franches et des asymétries.

Cette ornementation mi-organique, mi-géométrique créée une forte distinction. La déflagration de contrastes alimente une étrangeté tangible renforcée par l’association de couleurs chaudes et de couleurs froides. Cette dualité de la palette apporte une certaine profondeur.
Le processus de choix et de juxtaposition réunit formes et couleurs. Il induit un équilibre et autant de prétextes au passage du figuratif à l’abstrait. Dans une dynamique qui se nourrit du heurt d’éléments distincts, l’artiste remet de l’ordre.

Comme un symptôme de résistance, il revendique son goût pour les matériaux et les techniques d’antan. L’élément fragile évoqué par la porcelaine en témoigne. Dans cette confrontation de temporalités, ce va-et-vient continu entre le passé et le présent, le travail de Michel Marant est animé d’une réelle effervescence.
Ses compositions puissantes défendent un univers pictural singulier qui nous conduit du vraisemblable à l'insolite sans altérer l’immersion poétique de sa vision de la nature.