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Solange Bremens, « Je me souviens »


Anamnèses, 2017, technique mixte sur toile, 200 x 200 cm


Les "anamnèses" sont les oublis et la recomposition féconde de leurs traces remémorées ; les apories et les béances de notre mémoire.  
                                                                                                 
Solange Bremens interroge les événements, la manière dont ils se transmettent au fur et à mesure de leur éloignement irréversible dans le passé. Elle questionne les oublis, les trous noirs frappés d’une involontaire amnésie. Rechercher, recomposer quelques-uns de ces souvenirs est une quête fondamentale de chacun. Retrouver une image de l’enfance, vivace ou fugace, nette ou floue, voire complètement effacée est un processus qu’elle construit sous une certaine géométrie.

L’artiste recompose sa mémoire en noir sur blanc en quatre parties, sans quelconque perspective. Chaque partie montre un alliage. « Chacune est peinte à la fois de façon différente et semblable et me rappelle une histoire, celle d'un oubli, ou d'un fragment d'oubli relié. »
Laissées à l’état d’énigme, les surfaces sont des terrains d’apparitions de récits advenus. Ils construisent un univers fantasmé de strates réelles et fictionnelles qui s’imbriquent et s’entremêlent. Les pièces de ce puzzle reconstruit : « rappellent ce qui est en jeu, les instants suspendus qui se décrochent seuls, en labyrinthes parfois, dans un carré qui vient s’immiscer dans, dessous et contre un autre. »

Ce désordre agencé invite le regard à errer librement sur la surface. Solange Bremens travaille ses œuvres en ce sens, en prenant soin qu’elles soient modulaires et contaminées, toujours dans un entre deux, dans une constante évolution, à la fois en devenir et vouées à disparaître afin d’être livrées à l’interprétation de chacun.
Loin de l’apparente reconstitution du fait réel, elle donne forme à cette notion de transformation.

La toile montée sur châssis est enduite de gesso, d’acrylique noire, ivoire et de blanc de titane. La surface plane balaye les motifs géométriques, des représentations abstraites, spectrales, refoulées, telles des empreintes fossilisées surgissant des souterrains de l’inconscient. 
 « Il existe des clefs. L'abstraction s'occupe des clefs sans serrures, sans donner de leçons sur les choses, les pensées, les tendances (…) Elle oublie les règles (…) Nos mémoires nous testent. »
 
Dans ce jeu de mémoire et d’oubli, sous quelle condition la rémanence devient visible ? Les possibilités de dire, de survie, de rêve nous laissent en suspens.
Empilés et enfouis, les souvenirs entrent petit à petit en résonance et nous accompagnent dans la fuite de leur errance.