D’une minutie extrême, ses aquatintes non figurées figent ses
impressions personnelles inspirées d’espaces urbains, de nébuleuses aux lignes citadines,
anonymes et intemporelles. « Toutes
les formes visibles me servent… En particulier celle de la ville. »
Cette artiste qui a toujours
dessiné et peint, trouve dans la gravure un aboutissement, une catharsis
esthétique. « Une fois que l’on a
goûté à la gravure, on ne peut plus s’en passer. »
Elle dessine au préalable le motif
au pinceau, exclusivement sur plaque de métal puis vernit avant d’imprimer et
figer le motif sur un papier épais.
Empreinte de rigueur technique,
elle sait tracer avec exactitude et sans instruments des lignes droites ou des
cercles parfaits. Cet idéal de perfection et de précision du trait façonne son
œuvre.
Quelques fragments arrachés de son
imaginaire mettent en évidence la présence et l’absence. « Je laisse venir le hasard car il est toujours
mon ami. » Dans ce mouvement perpétuel, effervescent, entre la
contingence et la coïncidence, la musique et la danse résonnent et portent
l’écho de sa pulsation plastique.
Eve Stein donne l’impression de
penser en volume. Elle articule ses pans d’espace en procédant par strates. En
superposant les plaques pour mieux souligner les correspondances invisibles,
les séquences mélangées et fragmentées laissent les motifs s’autonomiser et se
distinguer en contribuant à l’effet de relief.
La représentation prolifère ainsi
au sein d’une perturbation harmonieuse. De l’infiniment petit au démesurément
grand, l’artiste déploie un certain sens de la profusion. Quelques-unes de ses
gravures sont le prolongement d’autres et nous invite à circuler entre le
fugace et l’étendu. L’ambivalence surgit d’elle-même ; elle nous dit la
beauté et l’étrangeté dans une dynamique moléculaire de concentration et
prolifération.
Ses aquatintes sont de véritables
constellations urbaines où la lumière prédomine et offre des zones à explorer,
béantes. Ces faisceaux de lumière transmuent la surface. « Je me sers de la lumière comme possibilité de repos, de souffle
qui fait jaillir le reste. »
Le reste c’est aussi la couleur,
des tonalités contrastantes qui appuient cette sensation de persistance sous
l’explosion d’une authentique longueur d’onde.
« Le noir et le rouge sont des tonalités fortes qui correspondent
à ma vision personnelle et intérieure. » De la lumière à la couleur, l’approche est immersive. On y jette le
regard ébloui dans un état presque hypnotique.
Eve Stein revendique la force
imageante non figurée des jeux de formes et de couleurs. Sa démarche
d’impression visuelle rend possible l’existence d’une architecture fractionnée,
morcelée accueillant toutes les projections possibles.