« L’ a.m.o.u.r.
est une onde qui traverse les galaxies et irradie notre subconscient. Avec
cette série, j'ai voulu me rendre au cœur de cette vibration pour capter cette énergie
formidable. »
36
photographies numériques faisant référence aux 36 visions de Jean dans
l'Apocalypse ont été prises sur le vif en mode manuel sans utiliser la mise au
point automatique et en contrôlant la vitesse et le temps de pause. Elles sont éditées
sans retouches et imprimées par les propres soins du photographe sur des
papiers d'art épais aux structures mates ou barytées.
De
l’expérimentation à la contemplation, du flou à la netteté, de l’éblouissement
à l’obscurité, Eric Petr utilise les propriétés de l’accident pour en révéler
l’éventail des possibles. La lumière et le temps sont la matière première de
son œuvre qui traite du « ça a été » ; une suspension du moment comme
l’analysait Roland Barthes. Une croyance spontanée attestant matériellement de
phénomènes non physiques du temps passé à jamais disparu. Ce temps qui
interroge la mort inévitable de toute chose et sa possible survivance
fantomatique dans l’image.
Il
y a cette fascination pour la tension entre le visible et l’invisible, pour
cette tentative d’exprimer ce que l’on ne voit pas et ce qui est indicible.
L’artiste souhaite restituer l’énergie ressentie comme une matière visuelle tout
en conservant la densité spectrale.
Ses
travaux jouent sur l’apparition de l’image avec le pouvoir de suggérer plus que
de montrer. Pressentiment, clairvoyance, dissolution, interprétation… Dans ce
continuum de strates, il ne se laisse pas aveugler par les facilités d’un art
contextuel. Le positionnement de sa démarche face à l’environnement est un
outil de conditionnement et de circonstances. Ses photographies ont été
réalisées pendant la procession de Noël 2017 à la Grotte de Sainte
Marie-Madeleine, en pleine nuit, dans la montagne de la Sainte Baume.
« Un
point de croisements énergétiques où, depuis des millénaires les hommes ont
édifié et pratiqué des choses très puissantes d'un point de vue
symbolique. » Les émanations du lieu incarné sont autant de fragments
autonomes à multiples vitesses. Chaque cliché propulse des éléments
dissemblables, redoublant l’altérité de l’appartenance et venant questionner
l’identité, le statut de l’événement et sa représentation.
Statues
de pierre, promeneurs, flambeaux… Des formes sculptées dans la lumière sont
traversées par des lignes étincelantes et agitées. Ce sont des phénomènes
imperceptibles à l’œil nu, des petits miracles en lévitation.
« Ces ondes ont des
fréquences qui échappent à notre spectre humain et terrestre. »
Le
cinétisme n’est pas une illusion d’optique. Eric Petr redonne à voir dans un
autre espace, un autre temps. Le regardeur est projeté dans une dimension surnaturelle,
hallucinatoire entre la reconnaissance et la désorientation sensorielle où ce
qu’il voit et ce qu’il sait est remis en cause.
0x38E61301, série [ a.m.o.u.r. ... ], image digitale, 2017
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Tout
repose sur l’investigation et la prise de vue qui s’installent dans la lenteur
de l’observation, d’un repos.
« Lorsque l'obturateur est
ouvert, je m'abandonne dans le flux de lumière qui vient à moi (…) Photographier
c’est pour moi une véritable méditation. »
L’expérience s’appuie en introspection
sur des facultés intimes de perception. Dans cette cavité profondément enfouie rien
ne se perd, tout est en
mouvement et se transforme chaleureusement.
Malgré la température glaçante (-10°C) lors de la captation, des
émanations de chaleur imperceptibles sont devenues sensibles invitant la force
rayonnante à s’envelopper d’un rouge magnétique.
« Cette tonalité est l'évocation
de l’amour, ce lien fraternel d'hommes et de femmes qui se réunissent dans un
élan commun spirituel. »
Eric
Petr ouvre l’imaginaire en créant un espace catalyseur de nos croyances. La
distance s’effile entre l’irréel et sa représentation. Les potentialités de
convictions et d’errance se confrontent et demeurent capturées dans un absolu
éphémère où la foi exclusive pour le tangible se laisse mettre à mal par le
champ vibratoire de la lumière.