Inspirées de l’écriture native de
Sumer et des hiéroglyphes, ses œuvres imprimées du passé se
transforment sous une vision contemporaine sans perdre leur énergie originelle.
Jean-Marie Bidet vit près de
Rochefort en Suisse, dans un canton d’horlogers où la gravure fait partie du
patrimoine depuis le 18e siècle. Ses gravures, mais aussi ses
acryliques sur toile, sur carton ou ses dessins se construisent comme des traces du passé, des poèmes en mouvement. Cette écriture illisible possède son propre rythme musical,
sans cesse en évolution. Interprétés à la manière du geste calligraphique, les
signes se parcourent comme des sculptures libres d’expression, hors du temps.
Indices et repères se perdent pour se charger d’un autre potentiel
d’occupation. Il ne se s’agit pas de lire mais de révéler ce qui peut se décrypter.
Les derniers travaux de l’artiste
retiennent
l’essentiel et se débarrassent de l’anecdotique. Ils tendent vers une approche plus minimale et fragmentée où
les formes géométriques, en particulier le carré se répète.
« Je suis constamment en recherche de moments plus intimistes. La
relation à l’intimité me semble adéquate avec la notion d’espace carré. J’ai le
besoin de me retrouver dans une zone maîtrisée, une sorte de refuge en somme
(…) C’est une façon de trouver de nouveaux espaces même si parfois le carré
revient pour fermer la porte. »
Jean-Marie Bidet sait
élargir son champ artistique et renouveler son discours. Il joue des
formes et des contrastes pour combattre le vide. Ce dialecte pictural dense
peut se passer de codes. Le relief est parfois renforcé par des cartons, des lamelles
de papiers collés, froissés. Les tons monochromes ; des couleurs vives et
joyeuses, rouges, bleues, jaunes participent à la matérialité. Dans ce jeu
sculptural, les mouvements s’épousent, se perdent et se confrontent sous une
complémentarité, conférant une force expressive très graphique.
Sous ces couches mémorielles du passé et du présent, le geste
arpente les volumes et ravive les contrastes. L’enlacement des courbes et
l’alternance des segments offrent une impulsion abstraite, émotionnelle et autonome,
dérivée de tout sens qui acquiert sa propre dimension. Un réseau inédit de
références autant intentionnelles qu’intuitives qui repose sur l’émergence du
hasard et de la maîtrise.
« L’abstraction doit être une sorte de quête émotionnelle. Une
œuvre est perçue souvent de manière différente, en fonction de notre humeur, de
la lumière, etc. »
Les œuvres de Jean-Marie Bidet sont des expériences visuelles qui
reconstruisent la perception. Elles ont cette volonté de révéler l’importance
esthétique du signe-trace. L’équilibre,
les espaces interstitiels établissent une hiérarchisation et invitent à la
reconsidération des marges et des limites, des présences et des absences. Ce
vocabulaire de vides et de pleins s’appréhende selon la perception intime de
chacun. Libre à nous de déchiffrer le message…