Patricia, acrylique sur toile, 80 x 80 cm |
Robert Augier est fasciné par l’atmosphère nocturne, musicale et
dansante. Il saisit l’immédiateté de la rencontre donnant lieu à des scènes festives,
sensuelles, parfois intimes dans un univers
clos où le temps semble suspendu.
L’atmosphère lascive est soutenue par une touche voluptueuse à l’acrylique réalisée exclusivement au
pinceau sur toile. Ses personnages sont essentiellement des femmes. Il peint
également des couples, des musiciens, des danseurs. Tous ondulent d’érotisme et
dégagent une sensation de flottement. Ils s’effleurent, s’enlacent, se
dévêtissent…
« Je regarde beaucoup de vidéos afin de capter
le moment qui m’intéresse notamment l’aspect amoureux de la position. Pour le
décor de l’arrière-plan notamment, c’est mon imaginaire qui intervient ou les
idées prises lorsque j’assiste à des concerts ou des bals. »
Robert Augier a cette particularité de redéfinir l’identité de ses
personnages en ne peignant pas leurs visages. Leurs regards muets et poétiques
contribuent à un certain flou sensoriel, une non identification.
Ces figures parfaitement singulières et incarnées dans leurs
apparences inachevées, nous contemplent d’un œil spectral, entre mouvement et
disparition. Sous leur fragmentation contrastée, la restitution du réel devient
prétexte. L’artiste sonde l’errance et le fabuleux.
« Les
visages ne comportent que les lèvres parce qu’elles sont pour moi l’expression
de la féminité, de la sensualité. Si je peins les yeux, je tue tout ! Car
les yeux attirent les yeux... On les regarde et on oublie tout le reste. Je
suggère pour apporter un peu de mystère, laisser le visiteur interpréter la
scène et imaginer l’atmosphère. »
Derrière
cette apparente volonté d’effacement, transparaît une expression du sujet, une personnalité
dévoilant les indices d’un caractère. Si ce procédé a le pouvoir de suggérer
plus que de montrer, il créé un certain questionnement en renforçant le
caractère énigmatique.
Les
formes se lient aux couleurs par un subtil procédé chromatique qui lie le
rouge, le noir et le blanc et parfois d’autres tonalités mettant en place un
sentiment paradoxal de reconnaissance et d’étrangeté.
« Le
rouge est incontournable pour les ambiances nocturnes des cabarets. Le blanc
souligne les lignes de la femme, apporte la lumière, la sérénité, la paix.
Enfin le noir habille le rouge et complète l’ambiance nocturne. »
Cette
palette restreinte participe vivement à la construction en s’insérant par
aplats et par touches. Elle procure des effets d’opacité, une dimension
physique, immédiate, une perspective secrète, nuancée et intégrée dans la
profondeur.
Certains
portraits tendent davantage vers l’intimité. Des jambes se croisent, se
dénudent, une petite culotte en dentelle glisse jusqu’aux chevilles... Ce jeu
de montré-caché donne une force esthétique. Attraction ou ambiguïté,
l’immersion demeure enveloppante. L’inspiration créatrice de Robert Augier frappe
par la subtilité de son rapport à la présence-absence de l’expressivité de la
figure, de sa féminité et son élégance.