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Marie Fang, doucement tribale et solidement mélancolique



 
Rêveuse, pierre de Caen

Elle explore le potentiel de la pierre, du calcaire, de l’albâtre et du marbre principalement en taille directe pour exprimer sa vision hors normes du corps.

La représentation morphologique est pour elle motrice. Marie Fang créée des sculptures humaines imaginaires en manifestant son désir de s'écarter de l'académisme conventionnel.
Elle rend pour ce faire une vision du réel où les notions de proportions et d’équilibre sont revisitées dans un processus de métamorphose. A la recherche du mouvement et de l’expressivité, elle développe son langage, perce la masse, façonne, élague un réseau de lignes, de volumes et de plans qui enserrent le corps, joue sur les vides et les pleins pour faire jaillir des formes rondes et voluptueuses. Ses sculptures s’inscrivent dans l’intimité, faisant du corps un espace de recherche. A la fois réalistes et fragmentées, elles portent une asymétrie dynamique, généreuse et procurent une véritable attraction sensuelle. Chacune exprime une personnalité dévoilant les indices d’un caractère de la féminité, sur les traces des femmes nues, exemples de fertilité de certains cultes primitifs.
« Il y a comme un rappel des vénus préhistoriques (…) Je sculpte surtout une idée de la douceur, de la beauté, de la vie et par conséquent de la création ; sans doute, consciemment ou inconsciemment je traduis cela par l'éloge de la femme. »
Marie redéfinit l’identité. Elle ne choisit pas l’évidence mais l’apparence. Ce processus l’amène à matérialiser le poids de la maîtrise et la démiurgie de l’aléatoire. L’éclatement de la mise en volume, l’évanouissement de la représentation dans la matière suggère une forme de resurgissement unique.
« Les formes sont poussées voire exagérées.  C'est également pour moi l'évocation de la Terre-Mère, de la Nature dont l'expression vitale s'exprime par l'abondance et la stabilité. »
C’est dans cette référence subtile avec le paysage nourricier que toute la poésie de l’espace de liberté s’exprime.

Il ne s’agit pas de chercher la ressemblance mais plutôt l'expression de l’âme. L’artiste accentue l’onirisme plutôt que les jeux de codes. Derrière une apparente volonté d’effacement, d’absorption de la figure, quelque chose transparaît et s’exprime. Certaines postures lascives évoquent le sommeil d’un corps, passif, qui s’abandonne ou semble se questionner sur lui-même.
Les sculptures « Rêveuses » et « Alanguies » évoquent précisément ce sentiment d’introspection, cette une forme d'attention que le sujet porte à ses propres sensations. « Pour signifier le repos, l'immobilité et le silence, l'apaisement, une certaine forme de détente physique et mentale nous conduit vers une forme de connaissance autre que celle procurée par l'activité. Une pause qui serait de l'ordre d'une attitude méditative et apporterait ce sentiment de bien-être bénéfique pour nous instruire de la vie intérieure. »

Les sculptures de Marie Fang ont cette faculté de séduire et d’apaiser. Leurs présences gracieuses invitent au toucher, à tendre la main pour palper le secret d’une réelle incarnation, doucement tribale et solidement mélancolique.