Il peint à
l’huile et à l’acrylique sous le pseudo Muta. Une première pensée dicte son esquisse puis il fractionne et décontextualise pour proposer une véritable remise en
cause de toute idée vraisemblance et de proportion.
“Il
m’arrive parfois de laisser libre cours à l’expression que j’appelle le chaos du
destin.”
Dans son agencement bouleversé, il trace les lignes, les courbes,
pose les limites, créé son propre ordre. Il fait l’inventaire des errances, des
hasards. Une manière de dompter la fuite et la persistance de l’inconnu qui
s’appuie pourtant sur le réel. Car Rimvydas Pupelis travaille d’après des modèles vivants.
« Les
modèles enrichissent mon travail en formes et en couleurs, ce ne sont jamais
les mêmes. A chaque fois ensevelis d’une lumière différente, ils donnent une
multitude des nuances pour comprendre ce qu’est un homme et une femme. »
La lumière devient matrice de la représentation qui absorbe le
réel dans la fragmentation et l’informe. Dans la composition, l’enfouissement
du réel est en quelque sorte une intériorité de la réalité. Son indice s’en
sépare pour devenir autonome. Quelques éléments de la nature tels que la pomme se
distinguent de façon récurrente. Ils introduisent des signes qui permettent d’établir des
comparaisons entre l’espace de la représentation et la réalité.
Non assujetti à l’imitation fidèle du réel, l’artiste reconstruit en éliminant les détails
et en simplifiant les formes. Les
corps, libres dans le mouvement, sont soumis à des épreuves sensibles. Ils sont
géométrisés, déformés, décomposés et
réassemblés en une composition abstraite. Les lignes dures, anguleuses
et brisées multiplient les points de vue. Les détails juxtaposés ou enchevêtrés
affranchissent la perspective pour donner une importance prépondérante à
l'éclatement des volumes en deux dimensions.
La recherche plastique fait référence au renouvellement de la
représentation, celle d’une expérience contemporaine du visible sur les traces
du cubisme.
« Il
n’y pas de période post-Picasso, l’artiste est si grand ! J'ai remarqué
que peindre sur les traces du cubisme unit la plupart de mes forces
spirituelles et matérielles à la création. Le cubisme permet d'aller au-delà
des dogmes classiques établis. Il permet de se déplacer librement dans l'espace
de représentation, et surtout, de sentir le contact des couleurs. »
Sur la surface, la couleur fait avancer les volumes. Le bleu, le
rouge, le vert, le rose, le violet… engendrent des effets chromatiques d’une
grande vitalité.
« Chaque
couleur incarne un sentiment diffèrent, à travers duquel j’essaye de toucher
l’esprit du regardeur. Devant chaque couleur, nous devons vivre un moment
intense de réalité. »
Ses séries récentes travaillent des espaces unifiés,
plus homogènes avec des figures humaines concentrées sur des fonds unis. Le fragment se concentre autour du
plus intime.
« La
fragmentation me permet d’atteindre la liberté intérieure. Devant chaque
modèle, j’essaye de trouver ce qui se cache derrière la forme visible pour le
refléter sur la toile afin d’établir le lien avec le spectateur. »
Les œuvres de Ruimvydas Pupelis multiplient le potentiel
narratif. C’est une tentative
d’évasion, une ouverture de perspectives, la poésie d’un espace de liberté où
l’équilibre semble pouvoir basculer à tout moment. Cette relation au monde,
jamais figée, nous laisse multivalent devant l’ordre des choses.