A la fois primitives et contemporaines, les sculptures totémiques de Michèle Coudert sont des masques qui fusionnent le rêve et la réalité, le conscient et l’inconscient, révélant la consistance d’une œuvre prolifique.
Elle esquisse d’abord au crayon un graphisme qui témoigne déjà d’un caractère, d’une personnalité. Puis le volume est travaillé à l’échelle souhaitée et réalisé avec la matière ; essentiellement le bois, le carton et le papier. Michèle Coudert a recours aux couleurs vives et à un certain degré d’abstraction. Elle simplifie et dépouille, accentue, déforme, à la recherche d'une vérité plus profonde que la ressemblance.
« J'adapte la technique proprement dite au propos que je souhaite exprimer. Le récit est toujours présent pendant la création. »
Lorsqu’elle ne travaille pas ses sculptures-masques, ses collages à l’acrylique arrachent également du sens en faisant surgir des éléments disparates, abstraits et porteurs d’une narration qui repose aussi sur la superposition de la matière, de l'équilibre des volumes, des formes et des couleurs.
L’artiste propose l’expérience consciente d’une narration
involontaire. Comme un envoûtement pictural qui se réinvente systématiquement
par magie. Chaque masque est unique et élargit son
vocabulaire esthétique. Le motif géométrique concentre l’attention sur le
détail. Certains semblent dormir,
d’autres rêver. Sans voix, le regard parfois clos, les œuvres de Michèle
Coudert ont pourtant beaucoup à raconter. On est tenté de
leur prêter une personnalité, une volonté. Dans un processus d’apparition et de
disparition, elles s’emploient à débusquer l’étrange derrière la réalité.
Ces masques sont l’héritage d’un art primitif. Ils témoignent d’un imaginaire collectif, une réserve de résonances réelles ou fictionnelles qui parlent à tous. À travers ces faciès cosmopolites, l’artiste exploite le ressort du mythe, ses représentations artistiques et son processus d’identification. Le masque joue de la représentation énigmatique par excellence de métamorphose, destinée à dissimuler le visage. Il voile autant qu’il dévoile le lien entre le monde des hommes et celui des esprits.
Les temporalités se confrontent en apportant une approche plastique qui joue de la matière et juxtapose les techniques mixtes. L’artiste révèle ici une intention tribale ultra-contemporaine.
« Ce
qui me plait le plus, c'est la modernité et la simplicité de l'art africain.
Avec une économie de moyens et un goût esthétique inné, cet art raconte et
transmet des histoires riches, une spiritualité. »
Les masques de Michèle Coudert sont des créatures aussi inquiétantes que bienveillantes issues d’un univers pictural mystérieux et amusé. Ils évoquent un carnaval d’un nouveau genre. Dans un écart intuitif, l’effroi et le ricanement se fabriquent volontairement, développant une trajectoire narrative propre à l’artiste.