"limites limites" |
Les installations de Viviane Jouvenot requièrent l’attention du regard et de
l’esprit. Elles correspondent à des histoires, des moments de son existence. Créées
à partir de matériaux divers, ces traces éparses de son cheminement intellectuel
élaborent une traversée de notre société.
Son oeuvre traite des processus de production
de pensée et de savoir, individuels et collectifs. Un langage formel qui devient
l’élément clé de véritables paysages mentaux, exploitant des objets qui
trouvent une vie nouvelle.
L’artiste invite à la reconsidération de la présence, de l’absence, de la renaissance, de l’humanité et son histoire.
Sa vision à la fois protectrice et
mémorielle établit des liens étonnants entre la matière et le concept.
« Le
concept est un mot nouveau dans l'histoire de l'art mais il a toujours existé. La peinture religieuse ou les œuvres dites
primitives étaient créées pour
des rituels bien définis. Je pense que le concept est nécessaire. »
Ses dispositifs hybrides, à la fois
accessoires et sculptures dans l’espace, se fondent sur un dense réseau de
références qui lui confère une épaisseur symbolique.
L'installation des "Bébés blancs"
questionne sur la notion d’identité avec des poupons provenant d’Emmaus,
repeints en blanc et défendant une logique de tension individuelle au sein du
groupe. Un véritable parallèle entre une plongée en soi et la substance du
monde.
"Omm" évoque la disparition et le
souvenir après une visite de l’artiste sur le site mémorial du camp des Milles à
Aix-en-Provence. Le dualisme entre le devenir du corps et de l’esprit hante particulièrement
Viviane Jouvenot qui traduit à nouveau cette évanescence spirituelle dans "Deviens
ce que tu es."
Le cube transparent de "limites
limites" constitué de film alimentaire avec des
interjections d’intellectuels de tous bords imprimés sur
transparents et collés sur le film, interprète les limites de la société de la
surinformation. Sur le même thème, "Palimpseste" s’amuse
de l’aliénante vanité des médias en rassemblant des feuilles de journaux marouflés et retravaillés à la l’ancre de chine, laissant
apparaître une nouvelle surface qui, à son tour disparaîtra.
Le parcours esthétique de l’artiste
s’envisage comme un relais poétique de sa vision sociétale. Un état du monde
troublant dans ses rapports de forces entre résistance, résignation, espoir et
destruction.
Les
sculptures coercitives de Viviane Jouvenot cohabitent et se déploient comme
autant de formes vives. Elles s’immiscent dans les interstices des espaces et
des temps. Des zones accessibles de la perception de l’intime et de l’universalité,
des intervalles inframinces où se jouent les occurrences de la mémoire.